mercredi 31 août 2011

l'avenir d'une illusion

Nous prenons ce titre volontairement en référence à l'ouvrage de Freud pour faire une petite analyse du libertinage.

Freud avait compris il y a un siècle que la culture et la civilisation se sont fondés sur la privation des pulsions. C'est en différant son plaisir que l'on cumule le savoir; c'est par la frustration des pulsions que se forment le tissu social et le tissu culturel d'une civilisation. Les interdits et les lois ne sont comme le disait Lacan que les lois du désir.

Le passage de la tribu à la civilisation s'est historiquement fait par les grandes religions qui ont été les premières à légiférer la société pour transcender l'individu et le local.

Mais les pulsions ne sont pas éteintes pour autant et l'homme conserve toujours un lien avec son origine animale et tribale. Comme un retour du refoulé, la pulsion vient se déplacer dans des actes ou des créations humaines; l'art, la science, la séduction, la parole que nous pourrions également associer à une pulsion sexuelle détournée; quand la folie ou la névrose ne fait pas du conflit entre la règle et la pulsion une crise impossible à résoudre.

Qu'en est-il alors du libertinage ? Comment se situe cette praxis et cette philosophie de la vie dans le social ?

Ne restons pour l'heure que sur la praxis, nous reviendrons plus tard sur les concepts et les idées qui sont sous-jacentes, mais pour un observateur qui découvre ce petit monde, il apparaît rapidement que le libertinage a les mêmes fonctionnement que les sociétés tribales.

Contrairement à l'imaginaire populaire qui voit en la tribu un lien de parenté et de culture, Morton Fried a montré au contraire que ce qui caractérise une tribu est beaucoup plus hétérogène que la simple culture, rituel ou tradition. Ainsi la caste des libertins ne peut se résumer à une seule pratique, un seul rituel; la sexualité y est protéiforme et emprunte ici et là les savoirs.

Les libertins s'enferments sous l'étiquette "libertin" mais les différences entre eux sont multiples et les rites, les codes et l'éthique diffèrent sensiblement d'un sous-groupe à un autre.

Au début, nous pensions que le libertinage se différenciait sensiblement par son éthique particulière, qui place le bien individuel au dessus de la règle sociale; mais ce n'est pas si simple. Les libertins, s'ils sont plus proches d'une éthique à la spinoza que d'une morale à la Kant, sont souvent pétris de règles et de principes qu'ils placent comme des vertus intouchables, dernier bastion ou vestige d'une peau sociale qui les protège notamment du polyamour, de l'affectif; car aimer un autre peut faire voler en éclat le couple libertin qui est plutôt fusionnel dans ses grandes tendances.

Les libertins d'aujourd'hui ne sont pas forcément les libertins du XVIIIeme siècle, le sulfureux est passé, aller contre la norme n'est pas la jouissance première. Nos rencontres nous ont plutôt amenés à observer une quête particulière de l'altérité, une forte recherche de lien social et de paroles libérées des convenances dans une société qui prône la performance.

On pourrait croire à priori que l'orgasme multiple et la multiplication des partenaire est la quête des libertins, il n'en est rien; la vraie pulsion qui fait retour ici, c'est le compagnonnage et le désir brut, débarrassé de ses normes.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire