mercredi 4 avril 2012

Retour à cold mountain


Après quelques semaines d'absences du à une autre passion plus musicale, je reviens aujourd'hui pour exposer quelques réflexions.




Pour avoir discuter ces dernières semaines sur la définition du libertinage et voir combien certains ont une visions fantaisiste de la chose et ce qui l'accompagne, je ne peux que redire ce qui me semblent de plus en plus évident. Le libertinage n'existe pas. Ou plus exactement n'existe plus.

En un autre temps, le libertinage avait une odeur de souffre et collait à la peau de personnages qui allaient contre les mœurs de leur temps. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, et l'apparition contemporaine d'un nouveau genre, le couple échangiste vient de plus changer la donne. Parler de couple libertin est manifestement une aporie. Soit on parle de couple libre, soit on parle d'une association de malfaiteur si j'ose dire, deux libertins qui convolent ensemble...

Ce que l'on nomme aujourd'hui libertinage, lorsqu'il est pratiqué solitairement, ressemble fortement à la catégorie sociale des dragueurs et des gentils garçons. Que ces derniers ou ces dernières soient d'ailleurs dans une consommation compulsive ou dans la recherche d'un partenaire idéal. Les deux faces se valent bien. L'idéal est par essence inatteignable. C'est un leurre.

Quant aux pratiques de couples, de ce que je peux observer depuis bientôt cinq ans, c'est essentiellement une sorte de new deal pour dépasser les problèmes classiques : asynchronie sexuelle, jalousie, désir et lien social.

Il est d'ailleurs intéressant d'observer les nouveaux venus dans cette pratique et la manière dont ils construisent leurs discours et leurs envies. Habituellement, ils entrent dans ce petit monde interlope par les fantasmes, mais comme à chaque fois, le fantasme n'est pas le bon chemin. Le fantasme par essence n'est pas réalisable, c'est donc forcément un ratage. Passé la déception (ou les frayeurs !) du début, les couples s’accommodent plus facilement de fantaisies sexuelles, ajoutant un nombre de frontières proportionnellement égales à la surface de leurs fantasmes, rendant ainsi le convolage en justes noces relativement bien normé et loin du souffre débridé des aïeux libertins.

N'oublions pas évidemment ceux qui viennent assouvir une forme de perversité (au sens littéral, pas la perversion). Eux savent très bien comment ils doivent jouir. Qu'ils ou qu'elles soient fétichistes, narcissiques, dans le contrôle ou dans des glissades homosexuelles à moitié assumées, tout peut se réduire finalement à une forme de fétichisme de corps, le leur ou celui d'un autre qui n'est qu'un corps idéal projeté, comme dans le candaulisme par exemple.

En réalité, ce sont ces derniers, ces prétendus pervertis pour la société qui font le trait d'union avec l'histoire du libertinage, car eux sont hors convention et sortent réellement des mœurs de notre temps, de tous les temps même. On y retrouve bien plus facilement la figure d'un Don Juan ou d'un Casanova que chez la plupart des couples.

Reste que si le mot libertin a changé d'acception, ces nouvelles pratiques signent la particularité de notre société en dérive affective. Comme un contre pied à la société du spectacle, ces néo-libertins cherchent à réinventer une vie de couple ou une vie affective qui soit plus respectueuse.

Je pense notamment à un homme seul néo libertin de condition, détestant les boites de nuits ou la drague et qui nous avait dit ne pas apprécier d'être pris pour un objet sexuel. Un discours étonnant décalé pour qui jette un œil trop rapide sur ce petit monde interlope.

14 commentaires:

  1. Oui et non. Le libertin est simplement celui qui vit sa sexualité et sa relation à l'autre librement. Décorélé de l'héritage culturelle qui est le nôtre. Qu'il soit seul ou en couple n'interfère pas dans son appartenance au libertinage. Son statut ou sa pratique n'ont pas de lien avec sa revendication pro-active de liberté.

    A mon avis, un abstinent par choix, et non par ordre socio-religieux, est également un libertin de premier ordre.

    Et pour le cas de l'homme seul, je vous rejoins: il est souvent, sous couvert de libertinage un jaloux en puissance. Donc un draggeur comme vous le dites bien. Ce qui est malheureux, car l'homme seul sincère dans sa démarche de libertin sera noyé dans la lot. Laissons lui le bénéfice du doute :-)

    RépondreSupprimer
  2. Comme le précisait, dragueur OU gentil garçon... les deux existent, l'un est compulsif, l'autre est un romantique qui s'ignore... Merci pour votre commentaire.

    RépondreSupprimer
  3. Une hypothèse : il y a, me semble-t-il, une contradiction entre le libertinage et la vie de couple vécue amoureusement. La relation libertine est de nature contractuelle et la relation amoureuse de nature symbolique. La relation symbolique est une parole partagée. Toute relation libertine fait l’objet d’un contrat tacite (un scénario) sur ce qu’il convient de faire ou de pas faire.
    C’est Don Juan ou Casanova qui pratique le libertinage : il ne s’engage pas ou il s’engage pour rompre ensuite.
    Mamu67

    RépondreSupprimer
  4. Bonjour, c'est effectivement une contradiction, d'où l'objet de ce blog. En réalité l'acception du libertinage a énormément changé.

    RépondreSupprimer
  5. Le libertinage est juste un joli mot.La définition que je donnerais est juste une forme "d'arrangement" dans un couple qui s'ennuie sexuellement.Ce n'est pas contradictoire avec l'amour,mais le libertinage est une autre forme de contrat,qui,comme le dit mamu67,balise la relation.On ne trompe pas sa femme ou son mari,on le vit ensemble,sans mauvaise conscience.
    Mais j'irai plus loin que mamu67,une vraie relation,amicale,amoureuse,sexuelle etc...ne se vit pas à plusieurs.Et là,le balisage n'est plus.
    Don Juan est un séducteur qui manque de confiance en soi et qui a peur de l'engagement.Il est narcissique.Casanova n'a pas peur des sentiments,il aime les femmes.Qui est libertin?
    Il n'y a aucun romantique qui s'ignore.Mais il est juste de mauvais ton de se revendiquer romantique dans ce milieu,comme dans notre société d'ailleurs.Il vaut mieux être performant,endurant,beau parleur pour plaire.Si c'était cela que les femmes dépourvues "d'intéret" cherchaient,ça se saurait!

    RépondreSupprimer
  6. Je modère car j'ai rencontré de vrais romantiques qui s'ignorent. On peut trouver chez certains libertins un caractère qui se déconstruit comme chez l'obessionnel : la femme qu'on aime, la femme avec qui on vit et la femme qu'on "baise"... Certains sont très amoureux d'une femme inaccessible et vivent leur sexualité par procuration. Aucun narcissime chez eux, mais un pis aller.

    RépondreSupprimer
  7. Dire que l'on est romantique,de nos jours,est bien plus mal vu que de dire qu'on est libertin.Cela ne se dit pas,c'est une marque de faiblesse.Je ne comprends pas bien votre développement.

    RépondreSupprimer
  8. si je peux me permettre de compléter, ce qui saute aux yeux quand on regarde la majorité des acteurs du "libertinage moderne" c'est leur désoeuvrement.

    C'est une activité de loisir qui permet de rencontrer du monde de façon originale et, croit on, sans avoir beaucoup de compétence.

    Sauf que bien entendu, comme pour n'importe qu'elle activité humaine, c'est toujours mieux quand on maitrise la technique et qu'on le fait avec passion en s'engageant personnellement.

    Alors il y a bien quelques "artistes" pour qui chaque sortie doit être un chef d'oeuvre (mais s'ils n'y arrivent pas toujours au moins ont ils fait de leur mieux) et face à eux l'immense majorité des sans talent qui surtout ne veulent pas de "prise de tête", juste une bonne partie de jambes en l'air à plusieurs, vite fait...

    Et le lendemain ils retourneront à leur désoeuvrement en enchainant les sorties en croyant faire quelque chose mais surtout pour oublier qu'ils n'ont rien d'autre à faire.

    RépondreSupprimer
  9. Bon résumé.Ce que je trouve malheureux c'est que le sexe soit réduit à un loisir quelconque...
    Etrange alors qu'au milieu de tous ces désoeuvrés les artistes ne fuient pas,tiens.N'est-ce pas le signe qu'ils y trouvent finalement leur compte eux aussi?
    Remarquez,pour ceux qui n'ont pas suffisemment de compétences,il existe maintenant un service de coaching pour les néo libertins...qui est le plus désoeuvré,le coach ou ceux qui viennent le voir?...
    Qu'en pense cple bohème.C'est vrai,on en oublierait presque que c'est votre blog (sourire)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Le coaching s'immisce aujourd'hui dans toutes les situations du quotidien. C'est un cancer qui veut faire croire qu'il y existerait une "norme"... Je vous conseille la lecture du DSM V pour vous faire une idée de ce que l'on appelle la norme. C'est assez édifiant...

      Supprimer
  10. ...on peut aussi aborder la question du libertinage à travers le prisme du Situationnisme et de la Société du Spectacle.

    En effet, pour un être humain, qu'elle plus parfaite "situation" que l'acte d'amour physique ? et pourtant !

    Beaucoup de libertins ne "vivent" pas "en eux même" ce qui est en train de se passer, très peu sont "dans" la situation. Pour le dire autrement et, peut-être, plus clairement, beaucoup de libertins sont "au spectacle" de ce qu'ils sont en train de faire. Ils le vivent en quelque sorte dans la "séparation", une partie d'eux agissant, tant bien que mal, sous le regard et le contrôle de l'autre partie qui regarde et "apprécie" le spectacle, et même le juge pour dire s'il est conforme aux modèles et aux canons du milieu...

    Pour le dire encore plus simplement, "ils se la jouent" libertin, mais le sont-ils vraiment ? et sont-ils tout simplement heureux ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Très juste ! Belle analyse !

      Supprimer
    2. oui, d'ailleurs, plus je vous lis et plus j'ai le sentiment que vous faites partie de ces gens qui "se la jouent" Libertin... en plus de vous la jouer musicien, philosophe, esthète, intellectuel...

      Allez mec ! détend ton string... lâche toi un peu.

      Supprimer
  11. blog hyper sympa.
    patrice
    croisierenaturisme.centerblog.net

    RépondreSupprimer